1 - 4 Appel à une véritable repentance
1 – Si tu reviens, ô Israël, dit l’Éternel, reviens à moi ; et si tu ôtes tes abominations de devant moi, tu ne seras plus errant, 2 et tu jureras en vérité, en jugement et en justice : “L’Éternel est vivant !” Et les nations se béniront [l’une l’autre] en lui, et en lui elles se glorifieront. 3 Car ainsi dit l’Éternel aux hommes de Juda et à Jérusalem : Défrichez pour vous un terrain neuf, et ne semez pas au milieu des épines. 4 Circoncisez-vous pour l’Éternel, et ôtez le prépuce de vos cœurs, hommes de Juda et habitants de Jérusalem, de peur que ma fureur ne sorte comme un feu et ne brûle, sans qu’il y ait personne pour l’éteindre, à cause de l’iniquité de vos actions.
L’Éternel désire que son peuple se repente et se tourne vers Lui (verset 1). Quelqu’un peut se repentir de certains péchés parce qu’il voit qu’ils sont nuisibles à sa vie (spirituelle) ou que certains péchés ne lui apportent pas les avantages escomptés. Dans ce cas, ces péchés sont abandonnés, mais il ne s’agit pas d’une véritable repentance. Il n’y a une véritable repentance que lorsque ces péchés sont confessés à Dieu et qu’il y a conversion vers Lui.
L’Éternel dit à son peuple ce qu’Il attend de lui s’il se convertit à Lui. Il ne peut accepter leur conversion comme intègre que s’ils se débarrassent des horribles idoles devant sa face et cessent d’errer sans repos d’une idole à l’autre. Cela implique une purification en profondeur de la ville et du pays, afin qu’il ne reste plus aucune idole ni aucun lieu de sacrifice idolâtre. Il n’est pas possible de marcher avec Dieu tout en continuant à pécher ou même en laissant subsister une occasion de pécher.
« Errant » signifie ne trouver nulle part le repos. Après avoir tué son frère, Caïn est « errant et vagabond sur la terre » (Gen 4:14). Il est en cela une image du peuple juif qui, après le meurtre du Seigneur Jésus, est « errant et vagabond sur la terre ». Il n’y a aucune stabilité, mais ils sont pour ainsi dire « ballottés et emportés çà et là par tout vent de doctrine » (Éph 4:14). L’idolâtrie, qui culmine dans l’adoration de la Bête, à laquelle ils sont amenés par la tentation diabolique de l’Antichrist, est donc un service extrêmement épuisant.
S’il s’avère que leur conversion est sincère, qu’elle vient du cœur, et qu’ils respectent le serment qu’ils ont prêté en son nom, cela sera un témoignage pour les nations qui les entourent (verset 2). Prêter serment au nom de l’Éternel signifie qu’ils le reconnaissent comme l’Éternel, le Dieu avec lequel ils sont liés par une alliance. Cela seul les amène à pratiquer la vérité, le jugement et la justice. Ils seront alors intègres, honnêtes et fidèles. En conséquence, les nations aspireront aussi à entrer en relation avec l’Éternel. Elles en expérimenteront la bénédiction et Lui en rendront gloire. Elles ne se glorifieront plus en elles-mêmes, mais en Lui.
Jérémie montre la nécessité d’un renouveau spirituel du peuple. Les hommes de Juda, et en particulier ceux de Jérusalem, sont interpellés sur leur responsabilité (verset 3). Il les exhorte à labourer leur cœur en friche ou non labouré. La charrue de la conversion et de l’obéissance doit passer par la conscience afin de pouvoir recevoir la semence de la Parole. Aucun agriculteur ne sème dans une terre non labourée. De même, Dieu ne sème pas la semence de sa bénédiction dans des cœurs non convertis.
Une terre non labourée est une terre en friche. C’est une terre où rien ne se passe. La terre est en repos, mais rien n’y pousse. Cette terre doit être labourée, des efforts doivent être faits pour la rendre fertile (cf. Osé 10:12). Il en est aussi de même pour les dons que chaque croyant a reçus de l’Éternel. Ils ne doivent pas rester inutilisés, mais être utilisés afin de porter du fruit (cf. Col 4:17).
Tout ce qui empêche cela, « les épines », doit être ôté, ou il faut éviter que ce qui porte du fruit ne se retrouve là. Si cela se retrouve parmi les épines, cela ne porte pas de fruit (Mt 13:7:22). Les épines sont étroitement liées au péché, elles en sont la conséquence (Gen 3:18a). Le péché dans la vie d’un croyant l’empêche de porter du fruit pour Dieu.
Une fois labourée, la terre n’est plus en friche et peut être ensemencée. Mais c’est alors que les épines peuvent commencer à pousser. Elles poussent généralement plus vite que les bonnes graines. C’est pourquoi il ne faut pas semer « au milieu des épines », mais hors de leur portée. C’est ce à quoi le peuple est appelé. Cela nous enseigne que nous devons rester à l’écart des soucis du monde et de la tentation de la richesse (Mt 13:22).
Pour obtenir le résultat du verset 3, la condition du verset 4 doit être remplie. Jérémie utilise ici l’image de la circoncision. Avant de pouvoir travailler de manière à ce que notre vie porte du fruit, quelque chose doit se produire dans notre cœur. L’apparence extérieure doit être remplacée par la réalité intérieure (cf. Deu 10:16 ; Rom 2:28-29). Cela signifie le jugement de soi, dont la circoncision est une image. Si celle-ci fait défaut, Dieu devra juger, car sans jugement de soi, il n’y aura que des mauvaises actions sur lesquelles s’abattra le jugement de Dieu.
5 - 18 L’ennemi est en marche
5 Annoncez en Juda, et faites entendre dans Jérusalem, et dites,… et sonnez de la trompette dans le pays ; criez à plein gosier et dites : “Assemblez-vous, et entrons dans les villes fortifiées.” 6 Élevez l’étendard vers Sion, fuyez, et ne vous arrêtez pas ; car je fais venir du nord le mal et une grande ruine. 7 Le lion est monté de son fourré, et le destructeur des nations s’est mis en chemin ; il est sorti de son lieu pour mettre ton pays en désolation : tes villes seront dévastées, de sorte qu’il n’y aura pas d’habitant. 8 C’est pourquoi ceignez-vous de sacs, lamentez-vous, et hurlez ; car l’ardeur de la colère de l’Éternel ne s’est pas détournée de nous. 9 En ce jour-là, dit l’Éternel, le cœur du roi défaillira, ainsi que le cœur des princes, et les sacrificateurs seront étonnés, et les prophètes stupéfaits. 10 Et je dis : – Ah, Seigneur Éternel ! certainement tu as bien trompé ce peuple et Jérusalem, en disant : “Vous aurez la paix ! …” et l’épée est venue jusqu’à l’âme. 11 En ce temps-là, il sera dit à ce peuple et à Jérusalem : – Un vent sec [vient] des hauteurs du désert, dans le chemin de la fille de mon peuple, non pour vanner, ni pour purifier. 12 Un vent plus impétueux que celui-là viendra de ma part ; maintenant, moi aussi je prononcerai [mes] jugements sur eux. 13 – Voici, il monte comme des nuées, et ses chars sont comme un tourbillon ; ses chevaux, plus rapides que les aigles. Malheur à nous ! car nous sommes détruits. 14 – Lave ton cœur de l’iniquité, Jérusalem, afin que tu sois sauvée ! Jusqu’à quand tes vaines pensées demeureront-elles au-dedans de toi ? 15 Car une voix annonce de Dan, et, de la montagne d’Éphraïm, publie l’affliction. 16 Faites savoir aux nations ; voici, faites entendre à Jérusalem : Des assiégeants viennent d’un pays lointain et font retentir leur voix contre les villes de Juda. 17 Ils sont tout autour d’elle comme ceux qui gardent un champ ; car elle s’est rebellée contre moi, dit l’Éternel. 18 Ta voie et tes actions ont amené sur toi ces choses, c’est là ton iniquité ; oui, c’est [une chose] amère ; oui, elle pénètre jusqu’à ton cœur.
L’Éternel doit faire venir le jugement, le jugement menace. Il viendra du nord, d’où viennent les Babyloniens. Le peuple s’est tellement corrompu que Dieu ne peut plus retarder le jugement. Dans sa miséricorde, Il avertit son peuple que le malheur approche. Pour cela, Il appelle à sonner de la trompette (verset 5 ; Osé 5:8 ; Jl 2:1 ; Am 3:6). Il faut aussi crier à haute voix, ce qui indique qu’il y a urgence. Les habitants de Juda et de Jérusalem peuvent alors se rassembler et se rendre ensemble dans les villes fortifiées.
L’étendard qui doit être élevée vers Sion (verset 6) semble être principalement destinée aux habitants des campagnes. L’étendard sert à leur indiquer la direction à suivre pour se rendre à Sion. C’est là qu’ils pourront se mettre en sécurité. Ils doivent s’y réfugier rapidement, sans se laisser retarder par quoi que ce soit (cf. Gen 19:16-17 ; Mt 24:15-18). Le malheur qui s’annonce vient « du nord ». Cela indique que l’ennemi envahira Israël par le nord. Mais c’est l’Éternel Lui-même qui apporte ce malheur du nord. Il inflige cette grande catastrophe à son peuple.
Il y a urgence, car l’ennemi, c’est-à-dire Nebucadnetsar, qui est ici comparé à un lion, est déjà « monté de son fourré », c’est-à-dire Babylone, pour s’attaquer au peuple de Dieu (verset 7 ; Jér 50:17). Il se jette soudainement avec une grande force sur sa proie. Le pays, « ton pays », sera réduit en désolation par lui et les villes, « tes villes », seront dévastées, personne n’y habitera plus. Cela montre bien à quel point la désolation et la ruine seront totales.
L’Éternel indique aussi à son peuple la réaction qu’Il attend de lui lorsqu’il apprendra que le jugement est inévitable (verset 8). Il doit se ceindre d’un vêtement de deuil, se lamenter et hurler. Jérémie s’identifie à nouveau au peuple lorsqu’il dit que la colère ardente de l’Éternel « ne s’est pas détournée de nous ». La cause en est que le peuple ne se détourne pas de l’idolâtrie. Jérémie en est bien conscient. Il a annoncé la colère de l’Éternel, mais il ne peut s’en réjouir lorsqu’elle s’abat aussi réellement. Il souffre avec le peuple.
Lorsque la colère de l’Éternel s’abattra, tous les chefs du peuple en seront profondément affectés (verset 9). Le roi Sédécias et les princes, les dirigeants politiques, perdront tout courage. La consternation frappera les sacrificateurs et la stupéfaction les prophètes. Ils ont fait croire au peuple des mensonges et y ont aussi cru. Maintenant qu’ils sont confrontés à la réalité, il ne reste plus rien de leur langage mensonger. Ils ne peuvent offrir aucun soutien au peuple.
La seule réaction que nous entendons est celle de Jérémie (verset 10). Il interrompt sa prédication pour exprimer ses sentiments. Il est profondément bouleversé par le message qu’il doit transmettre. Son grand amour pour son peuple, le peuple de Dieu, le pousse même à accuser Dieu d’avoir menti en parlant de paix. Il semble que Jérémie reproche à l’Éternel d’avoir permis aux faux prophètes de parler de paix et de sécurité et d’avoir laissé le peuple y croire (cf. Jér 23:17). C’est le contraire qui se produit, car « l’épée est venue jusqu’à l’âme ». Cela signifie qu’ils sont complètement au pouvoir de l’ennemi et qu’ils n’ont nulle part où aller.
L’Éternel a entendu l’accusation de Jérémie et l’a aussi fait consigner par écrit. Il apprécie son engagement et sa compassion, mais n’y répond pas. Jérémie ressemble à Moïse et à Paul qui ont aussi fait des déclarations par amour pour le peuple de Dieu, mais auxquelles Dieu n’a pas répondu (Exo 32:32 ; Rom 9:1-3). Cela nous enseigne que nous ne devons pas suivre nos émotions, mais les pensées et les sentiments de Dieu, tels qu’ils sont révélés dans sa Parole et par son Esprit.
L’Éternel poursuit son annonce du jugement sur le peuple et en particulier sur Jérusalem (verset 11). L’ennemi viendra comme « un vent sec [vient] des hauteurs du désert » qui dessèche toute la végétation. Ce vent se dirige vers le peuple de Dieu, que l’Éternel appelle « la fille de mon peuple » pour indiquer sa relation intime avec lui. Le jugement qu’Il doit rendre est aussi une chose douloureuse pour Lui.
Sa discipline est « non pour vanner, ni pour purifier ». Vanner et purifier servent à débarrasser le bien présent des éléments mauvais. Cependant, il n’y a rien de bon chez le peuple de Dieu, il n’y a donc rien à vanner ni à purifier. Tout est soumis au jugement.
Le vent du jugement est envoyé par l’Éternel Lui-même (verset 12). Il envoie un tourbillon (verset 13) qui emporte tout sur son passage. Il est le juge qui prononce le jugement et exécute la sentence. Cela se produit parce que le péché a été démontré avec toutes les preuves imaginables. Il n’y a pas de réponse à opposer. Il n’y a pas de circonstances atténuantes.
C’est pourquoi l’ennemi arrive comme des nuages qui obscurcissent le ciel (verset 13 ; cf. Ézé 38:16a). L’ennemi arrive avec des chars aussi rapides qu’un tourbillon. Les chevaux qui les tirent sont encore plus rapides que les aigles. Cela décrit l’arrivée des armées de Babylone, avec leurs chars et leurs chevaux de guerre. L’arrivée de l’ennemi est si rapide que la surprise est totale et que le peuple ne peut que s’écrier : « Malheur à nous ! car nous sommes détruits. »
La menace de l’arrivée de l’ennemi doit amener le peuple à laver son cœur de l’iniquité (verset 14). C’est dans le cœur que se trame le mal. C’est de là que proviennent les « mauvaises pensées » (Mt 15:19). Ce mal ne peut être lavé que par la confession et la repentance. S’ils le font, ils seront sauvés. C’est le souhait de l’Éternel. Mais Il connaît leur cœur. Il sait que des pensées pécheresses habitent en eux, qu’elles y trouvent un lieu de repos, et qu’elles ne peuvent en être chassées.
C’est pourquoi l’annonce du jugement se poursuit et l’Éternel n’arrête pas l’ennemi (verset 15). On apprend que l’ennemi a déjà envahi le pays et se trouve à Dan. La tribu de Dan est située à l’extrême nord d’Israël. Le prophète présente cela comme si c’était déjà en train de se produire. La tribu de Dan est la première à être confrontée aux armées envahissantes de Babylone et fait part de cette nouvelle à Jérusalem. Cette nouvelle est soulignée par une autre mauvaise nouvelle provenant d’Éphraïm. Éphraïm est beaucoup plus proche de Juda et de Jérusalem. Cela montre la rapide avancée des armées de Babylone vers Jérusalem.
L’approche de l’ennemi doit être signalée « aux nations » (verset 16). Cela peut désigner les tribus d’Israël (Deu 33:3). Il se peut aussi qu’il s’agisse des nations autour du peuple, qui doivent aussi faire face à l’avancée du roi de Babylone. Les « assiégeants viennent d’un pays lointain » sont les Babyloniens (Ésa 39:3). Jérémie présente la situation comme si l’ennemi est déjà si proche que la voix de l’ennemi se fait entendre dans les villes de Juda.
Une fois de plus, la raison de cette attaque venue du nord est clairement mentionnée (verset 17). Les assiégeants sont tout autour de la ville – Jérémie présente les choses comme si c’est déjà le cas –, tout comme les gardes sont tout autour d’un champ pour empêcher les animaux sauvages d’y entrer et de les dévorer. Les gardes ferment hermétiquement un champ. C’est ce que font les assiégeants avec Jérusalem. La tactique de l’ennemi consiste à occuper d’abord le pays, les villages et les villes autour de Jérusalem, afin de couper l’approvisionnement de la ville et de pouvoir l’assiéger.
Cette situation est le résultat de leur désobéissance à l’Éternel. S’il y avait eu la foi, un seul homme aurait pu arrêter l’ennemi (2Sam 23:11-12). Mais le péché affaiblit. Le peuple a désobéi à l’Éternel dans ses voies et ses actions (verset 18). Il ne s’agit pas d’écarts superficiels, mais de choses profondément ancrées dans le cœur. C’est pourquoi les jugements doivent toucher le cœur.
19 - 22 L’angoisse de Jérémie
19 – Mes entrailles ! mes entrailles ! je suis dans la douleur ! Les parois de mon cœur ! Mon cœur est en tumulte au-dedans de moi, je ne puis me taire ; car, mon âme, tu entends le son de la trompette, la clameur de la guerre ! 20 Ruine sur ruine se fait entendre, car tout le pays est dévasté : soudain mes tentes sont dévastées, en un instant, mes tentures. 21 Jusqu’à quand verrai-je l’étendard, entendrai-je la voix de la trompette ? 22 – Car mon peuple est fou, ils ne m’ont pas connu ; ce sont des fils insensés, ils n’ont pas d’intelligence ; ils sont sages pour faire le mal, mais ils ne savent pas faire le bien.
Jérémie est pleinement engagé dans son message (verset 19). Il vit ce qu’il prêche. Il en ressent le poids et en est accablé. Cela le touche profondément. Ses entrailles sont bouleversées et son cœur est troublé à la vue du malheur qui s’annonce. Il lui est impossible de garder le silence à ce sujet. Il doit le transmettre pour avertir. Il entend le son des trompettes et les cris de guerre des armées ennemies. Il s’identifie avec le peuple, le reste dans lequel est l’Esprit de Christ. Il est accablé par la situation méchante du peuple et ressent la colère de Dieu à ce sujet. Il exprime la voix du reste fidèle. C’est le langage du livre des Psaumes.
Dans son esprit, il voit comment les catastrophes s’enchaînent (verset 20). Les mauvaises nouvelles se succèdent, tout comme les messagers qui viennent voir Job. L’un n’a pas encore fini de raconter le malheur que le suivant arrive déjà avec une nouvelle annonce de malheur (Job 1:13-19). Tout le pays est dévasté par l’ennemi. En un instant, toute vie familiale dans les tentes est devenue impossible, car les tentes ont été détruites. Jérémie parle de « mes tentes », tant il est préoccupé par le sort du peuple. Il est totalement absorbé par les horreurs qui s’annoncent.
Il demande à l’Éternel combien de temps il devra encore voir l’ennemi régner en maître (verset 21). La question « jusqu’à quand » revient aussi souvent dans les Psaumes. Sa souffrance témoigne d’un amour profond pour sa patrie que personne d’autre ne ressent comme lui. La communion avec Dieu et l’obéissance à son service approfondissent toujours la sensibilité du serviteur. Comment cet homme, si profondément concerné par le sort de son peuple, peut-il être accusé plus tard de trahison ?
L’Éternel lui répond que la cause de toute cette misère se trouve chez « mon peuple » (verset 22). Ici, nous entendons aussi la douleur dans le cœur de l’Éternel. Bien qu’ils soient son peuple, ils ne Le connaissent pas. ‘Connaître’ signifie ici vivre en communion avec Lui et interagir avec Lui dans l’amour et la confiance. Il doit dire d’eux qu’ils sont « des fils insensés », qui vivent sans intelligence sur qui Il est et qui ils sont eux-mêmes (cf. Pro 1:7). Ils savent bien comment faire le mal, ils sont même « sages » en cela, « mais ils ne savent pas faire le bien ».
L’Éternel attend de nous que nous soyons sages quant au bien, mais purs quant au mal (Rom 16:19b). Nous ne devons pas confondre ni mélanger le bien et le mal dans nos cœurs et dans nos vies (Ésa 5:20).
23 - 26 La catastrophe cosmique
23 – J’ai regardé la terre, et voici, elle était désolation et vide, et vers les cieux, et ils n’avaient pas de lumière. 24 J’ai regardé les montagnes, et voici, elles tremblaient, et toutes les collines étaient secouées. 25 J’ai regardé, et voici, il n’y avait pas d’homme, et tous les oiseaux des cieux avaient fui. 26 J’ai regardé, et voici, le Carmel était un désert, et toutes ses villes étaient renversées devant l’Éternel, devant l’ardeur de sa colère.
Jérémie voit dans son esprit les conséquences de l’arrivée de l’ennemi. Il voit le jugement de Dieu comme une catastrophe cosmique qui rend le pays désolé et vide (verset 23), comme la terre avant que Dieu ne la forme et ne la remplisse (Gen 1:2). Les cieux sont dépourvus de lumière. Ce qui représente la solidité et la stabilité, « les montagnes » et « toutes les collines », est secoué (verset 24). Il n’y a plus aucun être vivant (verset 25). Il n’y a plus aucune trace de vie, car la terre fertile est devenue un désert et les lieux de rassemblement des hommes, les villes, ont été détruits (verset 26).
La description est vivante, simple, directe, riche en références et grave dans son contenu. Ce sont des versets uniques. Le prophète est guidé par l’Esprit pour témoigner de cette catastrophe cosmique. Quatre fois, il est écrit « j’ai regardé ». Cela s’applique au jour à venir de l’Éternel. Toute la nature est bouleversée et aucun élément n’est épargné.
Et alors que nous nous attendons à ce que cela soit dû à l’œuvre de l’ennemi, nous apprenons soudain que cela s’est produit par « l’Éternel », par « l’ardeur de sa colère ». Derrière l’œuvre de l’ennemi se cache la main de l’Éternel. Il est l’auteur de la désolation.
27 - 31 La désolation du pays
27 Car ainsi dit l’Éternel : – Tout le pays sera une désolation, mais je ne le détruirai pas entièrement. 28 À cause de cela, la terre mènera deuil, et, au-dessus, les cieux seront noirs, parce que je l’ai dit, je l’ai pensé, et je ne m’en repentirai pas et je n’en reviendrai pas. 29 Devant le bruit des cavaliers et des tireurs d’arc toute ville fuit : ils entrent dans les fourrés et montent sur les rochers ; toute ville est abandonnée, et aucun homme n’y habite. 30 Et toi, dévastée, que feras-tu ? Tu as beau te revêtir d’écarlate, te parer d’ornements d’or, te déchirer les yeux avec du fard, tu te fais belle en vain : les amants te méprisent, ils en veulent à ta vie. 31 Car j’ai entendu une voix comme celle d’une femme en travail, une angoisse comme d’une femme enfantant son premier-né, la voix de la fille de Sion ; elle soupire, elle étend ses mains : “Malheur à moi ! car mon âme a défailli à cause des meurtriers !”
Comme c’est l’Éternel Lui-même qui exécute ce jugement, cela garantit en même temps qu’Il en fixe les limites qui ne seront pas dépassées (verset 27). Cela offre une lueur d’espoir, l’espoir d’un reste. L’ennemi ne voudra rien laisser du peuple de Dieu, mais l’Éternel veille à ce que le pays ne soit pas détruit entièrement.
Cependant, la terre sera en deuil à cause des catastrophes qui s’abattront sur elle (verset 28). Et elles s’abattront. L’Éternel le confirme dans les termes les plus forts avec une quadruple conjuration :
1. « Je l’ai dit,
2. je l’ai pensé,
3. et je ne m’en repentirai pas
4. et je n’en reviendrai pas. »
Lorsque les cris des cavaliers et des tireurs d’arc qui approchent se font entendre dans la ville, toute la ville prend la fuite (verset 29). Ils cherchent tous un refuge hors de la ville, dans les fourrés et sur les rochers. Ils tentent ainsi de se cacher de la colère de Dieu (cf. Apo 6:15-16). Lorsque l’ennemi arrive à Jérusalem, toutes les autres villes de Juda sont déjà abandonnées, elles sont désertes, plus personne n’y habite.
Alors, l’Éternel se tourne vers la ville dévastée et lui demande avec ironie ce qu’elle compte faire maintenant (verset 30). Il pourrait lui dire que tout ce qu’elle fait pour se rendre belle afin d’attirer les ennemis de son peuple n’aura aucun effet. Elle veut ressembler à une prostituée et pense ainsi pouvoir échapper au jugement. Ses vêtements provocants, ses bijoux attrayants et ses yeux séducteurs – il est littéralement écrit qu’elle agrandit ses yeux avec du maquillage – auront l’effet contraire (cf. 2Roi 9:30 ; Ézé 16:26-29 ; 23:40-41).
Ses amants la rejetteront et lui rendront la vie impossible. Elle a perdu tout son charme et est mise de côté comme si elle n’avait aucune valeur. Il en est ainsi de tous ceux qui, pleins d’orgueil, se croient attirants aux yeux des autres, mais ne se demandent pas comment Dieu les voit.
Jérémie entend les cris d’une femme qui enfante son premier enfant (verset 31). L’angoisse que cela provoque est une image de ce que le jugement entraîne. Les douleurs de l’enfantement sont en même temps la promesse d’une nouvelle vie. Jérémie entend ici Sion haleter et tendre les mains pour recevoir de l’aide. La femme infidèle, la prostituée, doit devenir une femme en travail. Les meurtriers qui s’abattent sur elle doivent la conduire vers l’Éternel, repentante de ses péchés, afin qu’elle reçoive une nouvelle vie. L’exclamation : « Malheur à moi ! » en est le début.